Elle tourne un peu dans la pièce, comme si elle cherchait un endroit où poser sa
fatigue. Pas fatiguée de courir, Fatiguée de porter.
Porter les autres, leurs besoins, leurs silences, leurs attentes.
Et puis ce rôle qu’elle joue si bien : celle qui comprend, qui donne, qui aide, qui
soutient, qui console…
Elle s’est assise. Et elle m’a dit, presque en chuchotant :
“Je suis en colère. Et j’ai honte de ma colère. Je ne comprends pas pourquoi
ça me met dans cet état.”
Elle croyait qu’elle attendait un merci
Je l’ai laissée parler…
Une réunion au boulot où elle a tout organisé, tout prévu, pensé à tout le monde.
Une amie à qui elle a rendu service, encore…
Ses enfants à qui elle a fait passer leurs besoins avant les siens.
Une maman âgée dont elle s’occupe et qui la rudoie.
Et personne ne l’a remerciée.
Personne ne lui a dit : “ce que tu fais a de la valeur pour nous »
Et elle a craqué. Pas devant les autres. Non. Seule, dans sa voiture. Les larmes, la
rage, la fatigue : “Je me sens comme une bonne poire. Une idiote. Une servante
invisible. Tout le monde trouve ça normal…on me croit bonne qu’à ça… »
Je la comprends, mais je sais aussi qu’elle ne pleure pas parce qu’on ne lui a pas
dit merci.
Elle pleure parce qu’elle croyait que ce merci allait prouver, lui prouver, qu’elle a de valeur
aux yeux des autre.
Donner pour mériter d’être aimé·e
Derrière le besoin de donner, de plaire, il y a une vieille douleur et une vieille
croyance qui dit qu’on n’est pas légitime à être aimé pour nous, qu’il faut mériter
l’amour. Alors on devient expert·e en générosité. On devance les besoins. On donne sans
qu’on nous le demande.
Mais toujours, au fond, on attend…Qu’on nous voie. Qu’on nous choisisse. Qu’on
nous remercie.
Mais ça ne vient pas…
Mais surtout — ça ne peut pas venir. Parce que ce qu’on attend, ce n’est pas juste un merci.
Ce qu’on attend, c’est une réparation symbolique.
Un geste qui viendrait enfin nous dire : “Tu es digne. Tu as ta place. Tu n’as pas besoin de faire pour mériter l’amour.”
Ce n’est pas aux autres de réparer nos blessures anciennes
Alors on attend, on s’impatiente, on se fâche…mais ce n’est pas aux autres de nous réparer.
Ce n’est pas leur dette. Ils ne pensent pas à la régler parce qu’elle ne leur appartient pas.
Cette dette appartient à notre histoire, à notre famille, à notre passé.
Et à force d’attendre que quelqu’un d’aujourd’hui nous répare ce d’hier, on se
condamne à revivre la même déception.
Vous êtes la seule personne à pouvoir vous reconnaître
La seule personne qui peut solder cette dette, c’est vous.
Vous pouvez reconnaitre votre valeur. Vous pouvez vous aimer sans condition.
Vous pouvez vous offrir la légitimité que vous attendez encore des autres.
Parce qu’en réalité…
la seule reconnaissance qui répare, c’est celle qu’on se donne.
On croit qu’on a besoin d’un merci, d’une validation, d’un regard extérieur.
Et quand ce regard arrive, ça ne suffit pas. Ça ne soigne pas. Et même on y croit pas…
Parce que le vrai problème, ce n’est pas qu’on ne nous a pas reconnu·e.
C’est que nous avons, à un moment, intégré l’idée que nous ne valions pas
grand-chose.
Ce n’est pas l’autre qui a inscrit en nous cette invisibilité : c’est nous qui avons interprété, à force de silence ou de distance, que nous n’étions pas dignes
d’amour.
On s’est dit : je dois faire plus, être mieux, plaire davantage… pour mériter.
C’est pour ça que la reconnaissance des autres ne répare pas : elle ne fait que glisser sur une faille qu’on a nous-mêmes validée, profondément, souvent très tôt.
Alors oui, il y a une bonne nouvelle au bout de cette lucidité : si c’est vous qui avez validé cette croyance à un moment… c’est vous aussi qui pouvez la déconstruire.
Pas en vous répétant des mantras creux.
Mais en choisissant, avec détermination et tendresse, d’avoir de la valeur pour
vous, de vous croire, de vous choisir, de vous valider, de vous aimer, de vous
protéger
A vous de jouer ! Quatre questions pour solder la dette invisible :
- À qui avez-vous confié le pouvoir de dire que vous avez de la valeur ?
- Si vous décidiez aujourd’hui que vous êtes déjà suffisant·e… quelles preuves avez-vous oubliées en chemin ?
- Qu’est-ce que vous feriez différemment… si vous n’aviez plus besoin d’être reconnu·e pour vous sentir légitime ?
- 5 raisons de vous dire merci !